absurdes

Armande avait beaucoup de traits de caractères fâcheux, pas si rares à vrai dire, qu’il acceptait en bloc comme les clés absurdes d’une ingénieuse devinette.

Vladimir Nabokov, La transparence des choses, Fayard, pp. 98-99.

David Farreny, 20 mars 2002
oisif

Oisif demeuré tout le week-end — conçu de cela aucun remords.

François Rosset, Froideur, Michalon, p. 145.

David Farreny, 15 nov. 2002
steamers

Vaisseaux des ports, steamers à l’ancre, j’ai compris

Le cri plaintif de vos sirènes dans les rades.

Sur votre proue et dans mes yeux il est écrit

Que l’ennui restera notre vieux camarade.

Vous le porterez loin sous de plus beaux soleils

Et vous le bercerez de l’équateur au pôle.

Il sera près de moi, toujours. Dès mon réveil,

Je sentirai peser sa main sur mon épaule.

Jean de La Ville de Mirmont, L’horizon chimérique, La Table Ronde, p. 22.

David Farreny, 9 sept. 2003
géographie

Il est reposant de rouler sur le plateau de Saclay, entre les labours et les bois défeuillés, noirs contre le ciel qui s’est éclairé, enfin, d’un bleu pâli, convalescent, où flotte le soleil falot de février.

Il fait un peu de vent. La température n’excède pas un ou deux degrés et mes vieilles cicatrices d’opération, dans la gorge, se remettent à vivre, dessinent, dans l’épaisseur de la chair, une bizarre et douloureuse géographie.

Pierre Bergounioux, « samedi 2 février 1991 », Carnet de notes (1991-2000), Verdier, p. 13.

David Farreny, 20 nov. 2007
phrase

Dans le brassage des concepts il était de plus en plus difficile de trouver une phrase pour soi, la phrase qui, quand on se la dit en silence, aide à vivre.

Annie Ernaux, Les années, Gallimard, p. 222.

Élisabeth Mazeron, 23 mai 2008
halte

Mais parce que la pluie avait cessé, j’ai continué à marcher ; à présent les heures que j’ai passées dans ma chambre, avec le soleil à mon réveil, ne sont plus qu’une halte dans la marche que j’ai commencée il y a très longtemps. Je n’ai pas ménagé mes forces ; de celles que j’avais en me réveillant, il ne me reste qu’un souvenir, comme de ce soleil qui éclairait ma chambre avant la pluie ; elles ne me soutiennent pas plus que ce souvenir n’éclaire la rue maintenant. C’est entendu : je perds mes forces, je perds mon temps, je n’ai pas de volonté. Je crois tout de même que c’est ce que je voulais.

Henri Thomas, La nuit de Londres, Gallimard, p. 134.

David Farreny, 7 août 2009
convaincre

Allée des orangers : les cloches dans la nuit lancent un petit espoir de convaincre, tellement dissous qu’il atteint toujours le cœur de la cible.

Gérard Pesson, « dimanche 5 janvier 1992 », Cran d’arrêt du beau temps. Journal 1991-1998, Van Dieren, p. 51.

David Farreny, 22 mars 2010
gazon

35. Sujets de poésies

La capitale. La puéraire. La bardane d’eau. Le poulain. La grêle. Le bambou nain. La violette à feuilles rondes. Le lycopode. L’avoine d’eau. La sarcelle. Le canard mandarin. Les massettes poussées çà et là, en automne. Le gazon. La liane verte. Le poirier. Le jujubier. Le « visage du matin ».

Sei Shônagon, Notes de chevet, Gallimard, p. 92.

David Farreny, 12 avr. 2011
question

J’étais assez peu décidé à retourner à Arles, et, quant à Marseille, je me trouvais face à la délicate question de m’y rendre pour acheter des chaussures avant, en quelque sorte, d’y être arrivé de manière naturelle, ou instinctive, ou encore globale, ou absolue, à savoir de ne pas y être arrivé fondamentalement tout en m’y trouvant de façon anecdotique. Inversement, j’avais besoin de mocassins maintenant, et non quand j’arriverais de façon naturelle à Marseille, de sorte que, tandis que je recherchais l’endroit où je m’étais garé, je m’exerçais à exclure mentalement, en dehors d’Arles, soit les mocassins, soit Marseille, aucune de ces solutions ne me paraissant satisfaisante.

Christian Oster, Rouler, L’Olivier, p. 132.

Cécile Carret, 30 sept. 2011
opprime

Durant l’enfance, quand aucune impression ni émotion n’est encore devenue ordinaire, l’été, avec les déplacements qu’il amène, les profonds changements dans les habitudes de la journée, les fréquentes solitudes et les isolements qu’il impose, avec, à pic au-dessus de la maison, les hauts silences écrasants ou dehors, dans la campagne, ce bourdonnement infini et ce lointain bruissement, suscite dans le cœur un égarement pareil à une blessure. L’enfant sent qu’est en train de passer sur la terre quelque chose d’énorme, d’impérieux et de vague qui, dans les hommes, les animaux et les plantes, opprime et charme la vie.

Mario Luzi, « Été, enfance », Trames, Verdier, p. 27.

David Farreny, 26 fév. 2013

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